Agressée sexuellement par un massothérapeute: les délais judiciaires «trop longs» ont découragé une victime

Une femme de Québec, qui soutient avoir été agressée sexuellement par son ancien massothérapeute, déplore les délais judiciaires «trop longs» qui l’ont menée à retirer sa plainte avant la tenue du procès pour sauver sa santé mentale et physique.
Aujourd’hui âgée de la quarantaine, Adrienne (nom fictif) affirme qu’elle vit encore avec les séquelles de cette présumée agression, perpétrée il y a plus de cinq ans à Québec.
Un massothérapeute de Québec, aujourd’hui dans la cinquantaine, a été accusé d’agression sexuelle à l’endroit d’Adrienne en octobre 2021, près de 20 mois après le dépôt de la plainte par celle-ci au Service de police de la ville de Québec (SPVQ). Il a ensuite plaidé non coupable en septembre 2022.
Nous avons décidé de ne pas nommer le massothérapeute, puisqu’en mars 2023, «épuisée» par le processus [policier et judiciaire] », Adrienne a retiré sa plainte.
«Ma santé mentale était au plus bas, j’avais des idées noires [...] J’étais incapable d’avancer, de passer à autre chose», confie-t-elle.
Même si sa décision l’a «soulagée» sur le coup, elle admet l’avoir regretté, plus tard. «J’aurais aimé prendre parole, j’étais prête. Mais, c’était tellement long, que j’ai perdu la force», poursuit-elle.
Le procès était imminentPour sa part, Me Geneviève Corriveau, la procureure du Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) qui pilotait le dossier, soutient que la tenue d’un procès dans cette affaire était imminente.
Me Corriveau reconnaît toutefois que la pandémie a eu des effets importants sur les délais judiciaires à cette époque.
Elle ajoute également que les durées des enquêtes policières sont indépendantes des délais judiciaires, qui s’échelonnent habituellement entre 18 et 30 mois.
Deux consultationsC’est après avoir reçu deux références de ses amies, aux prises avec des douleurs lombaires, qu’Adrienne est allée consulter le massothérapeute.
Lors d’un deuxième rendez-vous avec lui, en février 2020, le massothérapeute aurait décidé de s’attarder à la région de son aine. L’homme lui aurait alors demandé de retirer son pantalon et son sous-vêtement.
Rapidement, ses mains recouvertes de gants de latex se seraient dirigées sur les parties intimes d’Adrienne. «Complètement figée» et paniquée, la quadragénaire n’a pas réagi.

Une femme âgée de la quarantaine, qui soutient avoir été agressée sexuellement par son ancien massothérapeute, confie à la journaliste Elisa Cloutier avoir été découragée par les délais liés au processus judiciaire et policier, si bien qu’elle a choisi de retirer sa plainte avant la tenue d’un procès. Photo Stevens LeBlanc
«Il y allait allègrement, me touchait et massait, il me pinçait, ça me faisait mal et me répétais: “Je le sais que ça fait mal, je n’ai pas le choix, sinon tu seras pire après”», relate-t-elle avec émotion.
«Quand ça a fini, il m’a donné un bec sur le front et il est sorti», ajoute-t-elle, encore ébranlée.
CauchemarLes jours et les semaines qui ont suivi ont été un «cauchemar», confie-t-elle.
«Je tremblais, c’était la confusion totale [...] Je me sentais sale, triste, en colère», dit-elle.
Aujourd’hui, elle affirme devoir encore composer avec les évènements.
«Je dois maintenant le nommer quand je rencontre quelqu’un par exemple, je dois l’expliquer, ça fait comme partie de moi», confie-t-elle.
Le Journal a contacté le massothérapeute en question. Il n’a pas répondu à nos messages, mais nous avons appris qu’il ne pratique plus ce métier.
LE Journal de Montreal